Spa Manager au Four Seasons Genève

Par Laure JEANDEMANGE.

Virginie Descombes Fliegans est une nomade du spa. Après quelques années de spa en spa à travers le monde, elle s’est enfin posée au Spa Mont Blanc du Four Seasons à Genève. Un parcours inspirant et inspiré…

Virginie Descombes Fliegans

Virginie Descombes Fliegans

LA DÉCOUVERTE DU BIEN-ÊTRE

Je souhaitais être kinésithérapeute sans frontières afin de voyager dans le monde dans le but premier d’aider les personnes, mais je n’ai pas réussi le concours d’entrée. C’est à ce moment-là que je me suis tournée vers l’esthétique, avec une certaine appréhension due à l’image que ce métier véhicule. J’ai rapidement découvert à quel point ce métier exigeait des qualités d’écoute, d’empathie, un sens du contact et qu’il ne se résumait pas à exécuter un soin.

LE STAGE QUI A TOUT CHANGÉ

J’ai choisi de m’inscrire à l’École FD Conseil et je me suis activement mise à la recherche d’un apprentissage. Afin de mettre toutes les chances de mon côté, j’ai postulé dans différentes structures, même dans les hôtels de luxe. Lors d’un entretien dans un institut, il m’a été demandé si j’avais d’autres propositions en cours et je leur ai expliqué que la responsable du Spa Anne Semonin de l’Hôtel Bristol avait retenu ma candidature. J’y avais déjà effectué une journée d’essai mais la perspective d’y travailler m’enthousiasmait peu. Cette personne m’a alors conseillé de privilégier cette proposition en m’exposant les avantages à travailler dans le luxe.

LA DÉCOUVERTE DE L’HÔTELLERIE

Cette expérience fut enrichissante tant sur le plan humain que professionnel. Je me souviens avoir eu la sensation de participer à quelque chose de grand. La multitude des services, la diversité des métiers, et la rencontre avec des personnes d’horizons différents est très formateur. Tout comme avoir la chance d’accueillir une clientèle locale et internationale. Durant cette année, j’ai pu apprendre tous les codes de l’hôtellerie de luxe.
Ne connaissant pas ce milieu ni les protocoles, je me suis retrouvée dans une situation des moins surprenantes quand un client du Moyen Orient m’a donné un pourboire considérable pour lui avoir apporté son thé. Novice dans cet univers, j’ai indiqué à ce client que le thé lui était offert…
Ma responsable m’a expliqué que c’était pour moi… moment de solitude…
La patience, l’humilité, le sens du service, l’empathie et le sens du contact sont des qualités indispensables pour réussir dans ce secteur. Sans oublier les langues.
Là aussi j’ai considérablement amélioré mon Anglais !

LE SPA EN SAISON

J’ai découvert cet autre univers en partant avec Marie Christine Tessier pour l’ouverture du spa l’Alpage Anne Semonin au sein de l’hôtel de l’Etrier à Crans Montana. Être saisonnier c’est vivre en collectivité avec tout ce que cela peut comporter de positif et de négatif.
C’est aussi un rythme intense où les heures ne sont pas comptées, où il faut être disponible et flexible, accepter d’avoir peu de temps pour soi et surtout une bonne condition physique !
Ce n’est pas tous les jours faciles, mais l’expérience humaine y est très enrichissante. J’ai beaucoup appris sur moi-même et acquis de nouvelles compétences.
J’ai tissé des liens vraiment forts avec mes collaborateurs, à tel point qu’à la fin de la saison cela a été une vraie déchirure. Dans cette bulle on se sent en sécurité, soutenu.

CRÉATION-FORMATION

Cette expérience m’a amenée à travailler pour une belle marque de cosmétiques et m’a permis de développer de nouvelles compétences, celles de la création et de la formation. Dior m’a confié la mission de développer ses soins corporels selon une méthode déjà établie des soins du visage. Ce travail créatif m’a beaucoup plu, j’ai élaboré les manuels de formations, créé une méthode, travaillé avec des scientifiques afin de mettre au point une machine.
Parcourir le monde pour former des professionnels à ces protocoles demande beaucoup d’exigence car il faut constamment s’adapter à un savoir-faire, des cultures et des personnalités différentes.

RETOUR EN ALSACE

Ma vie personnelle m’a ramenée en Alsace, où j’ai enseigné la pratique dans une école d’esthétique.
Je me suis rendu compte à quel point certaines écoles n’étaient pas en phase avec la réalité et enseignaient des méthodes dépassées sur des machines obsolètes.
Afin de préparer ces élèves au monde du travail, j’ai amené des modèles hommes en cabine pour préparer ces futurs professionnels à travailler avec cette clientèle nouvelle – il y a 13 ans – et notamment leur apprendre comment leur parler, que leur conseiller et aussi comment gérer les éventuels « conflits » liés à certaines situations.

EN ROUTE POUR TAHITI

Lorsque l’opportunité de partir en tant qu’assistante spa manager pour le Saint Régis de Bora Bora s’est présentée, je n’ai pas hésité !
Pourtant, dans l’avion, j’ai beaucoup pleuré à l’idée de m’isoler au beau milieu de l’Océan Pacifique, d’autant que cet éloignement ne facilite pas les allers retours. La seule île que je connaissais, c’était l’île d’Oléron !
J’avais 27 ans pour cette première expatriation. J’ai continué à prodiguer des soins et commencé un rôle de manager. J’ai organisé mes premiers meetings et j’ai découvert à quel point la cohésion d’équipe rejaillissait positivement sur l’ambiance du spa.
Vivre sur une île a des avantages et des inconvénients. La possibilité de côtoyer un milieu d’expatriés du monde entier, de travailler à leurs côtés, de passer du temps avec eux également hors du travail. Une vie en vase clos.
Pour des raisons familiales, j’ai dû quitter Bora Bora après un an. Après quelques mois en France, j’ai décidé de retourner en Polynésie. J’ai rejoint le groupe Orient Express avec la double casquette d’assistante spa manager et responsable des activités clients. Là encore, de nouvelles tâches m’ont amenée à élargir mon panel de savoir-faire. Créer un book d’activités pour la clientèle, établir des contrats partenaires, promouvoir notre destination à Tahiti. Cette expérience a pris fin au bout d’un an à cause des dégâts matériels causés par un cyclone, contraignant toute l’équipe à partir.

Les clients réservaient leur soin d’une année sur l’autre

DIRECTION LE MAROC

Gros changement au Maroc au Mazagan à El Jadida. Une structure énorme avec 2000 employés dont 40 personnes au spa. Mon rôle d’assistante du directeur spa était de gérer l’équipe des thérapeutes et coiffeurs. J’y ai appris la rentabilité et l’aspect financier.
Pour moi qui aime avant tout le côté intimiste des spas et la proximité avec mon équipe, il m’était difficile de me retrouver dans ce genre de complexe.
Quelques mois plus tard, une amie m’a appris que le Sofitel d’Essaouira recherchait son spa manager. Ma première expérience en tant que telle et pour une ouverture ! J’ai adoré, très stimulant !
Avec l’équipe, nous étions dans la même tranche d’âge avec une belle énergie et soudée face à notre objectif commun. Nous avons contribué à cette ouverture avec succès ! Beaucoup de pressions mais dans un esprit positif.
Lors de l’ouverture, nous étions en lien étroit avec tous les services et cela nous a permis de grandir ensemble.

DU MAROC À L’ÉGYPTE

Après un an, le Sofitel m’a demandé de partir en Égypte au Sofitel Legend Old Cataract pour le poste de spa manager. Arrivée en décembre 2011, cela faisait plusieurs mois qu’il n’y avait plus de direction spa et j’ai donc remis les standards en place, réorganisé les basiques. Le fait de mettre la main à la pâte avec l’équipe a créé une confiance et un respect mutuels. J’étais là pour aider, soutenir, accompagner. Malheureusement avec la révolution, l’hôtel s’est vidé et j’ai dû partir, faute d’activité.

UNE AUTRE ÎLE

Un bureau de recrutement m’a proposé le poste de spa manager au Royal Palm, à l’Île Maurice. Mon rôle était de gérer le fitness et le spa composé d’une équipe de 20 personnes. Intégrer une équipe déjà en place depuis plusieurs années était une nouveauté.
J’ai eu la chance d’avoir beaucoup d’écoute et de compréhension. J’ai mis en place un partenariat avec un acupuncteur ainsi que des ostéopathes, des physiothérapeutes et des podologues.
La clientèle de ce resort était très fidèle, en effet 50% des clients revenaient tous les ans ! Les clients réservaient d’une année sur l’autre pour des soins avec leur thérapeute. D’où l’importance de veiller sur son équipe, de se faire accepter par les collaborateurs et par la clientèle ! J’ai passé beaucoup de temps à échanger avec l’équipe via des entretiens individuels pour comprendre quelles étaient leurs attentes. Et j’ai également investi beaucoup de temps avec les clients, boire un thé, échanger.
La politique de l’Île Maurice par rapport au recrutement des étrangers a changé et après trois ans de bonheur j’ai dû quitter cet endroit merveilleux.

UNE ÎLE, TOUJOURS PLUS PETITE

Me voilà aux Maldives, dans une structure complètement différente. Un concept global wellness avant-gardiste. Vivre sur 1 km2 de sable favorise l’introspection… J’ai beaucoup appris sur moi-même. Après un an et demi, « la fever island » m’a frappée et un besoin viscéral de retrouver la terre ferme et ma famille s’est fait sentir.
Une annonce sur Linkedin pour le poste de Directrice Spa au Four Seasons à Genève m’a permis de réaliser ce retour aux sources.

Vivre sur 1 km2 de sable favorise l’introspection

RETOUR EN SPA HÔTELIER

Quelle chance d’être là !
Me retrouver à la gestion d’un city spa avec une clientèle différente permet d’apprendre encore, d’évoluer. Les besoins ne sont pas les mêmes que dans un resort où les hôtes sont en quête de pure relaxation. Dans un city spa, la démarche est plus axée sur la recherche de résultats, de soins ciblés, spécifiques.

UN SPA RENTABLE

Il est important de ne pas se focaliser uniquement sur la clientèle de l’hôtel et c’est pour cette raison que nous proposons des prestations rares et innovantes avec la venue de spécialistes comme Brice Nicham, un podologue qui allie le médical au bien-être sans oublier l’esthétique. Des wellness pratictionners interviennent également très régulièrement et proposent des programmes très pointus.
Pour les membres de l’équipe, c’est très stimulant, ils ont accès à ces personnes, peuvent échanger avec elles. Les conseils et, de ce fait, les ventes générées par l’équipe du spa contribuent à sa rentabilité.
De plus, au sein de notre spa, nous avons un club qui s’est inscrit dans la ville comme un endroit prisé. Celui-ci nous permet également d’assurer un bon équilibre financier.

Le club nous permet d’assurer le bon équilibre financier du spa

CONSEIL À UN SPA MANAGER

Maîtriser ses coûts est la base de ce métier. Rester à l’écoute de tous les membres de son équipe, développer leurs compétences et les impliquer dans la vie du spa sont des facteurs primordiaux qui permettent de créer une synergie.
Associer les collaborateurs des autres services afin d’élargir votre vision fait que l’on voit les choses d’un autre angle et permet de trouver des solutions. Il est essentiel de prendre de la hauteur.

IMPLIQUER L’HÔTEL

Gérer un spa, c’est gérer un mini hôtel, tous les services interfèrent avec celui-ci. La cohésion avec les autres départements permet d’impliquer nos collègues afin de parler du spa. Je communique en réunions sur les nouveautés et propose aux employés de l’hôtel de servir de modèles. Des jeux de rôle sont organisés également afin de toujours nous améliorer et ne pas rester sur ce que nous pensons acquis.

Le bien-être pour tout le monde

Il me semble essentiel, lorsque l’on travaille dans le luxe, de rester connecté avec le milieu hors de cette sphère. Ainsi, avec l’équipe du Royal Palm, nous faisions du bénévolat au sein d’une association pour les femmes en rémission de cancer. Nous proposions des manucuries, pédicuries, poses de vernis, brushings. Ces soins apportent énormément à ces femmes mais aussi à l’équipe.

LE MEILLEUR CONSEIL QUE J’AI REÇU

Jusqu’à aujourd’hui, le meilleur conseil reçu a été celui de l’esthéticienne qui m’a encouragée à suivre mon apprentissage au Bristol plutôt que dans son institut. Si elle ne m’avait pas dit cela, si je ne l’avais pas écoutée, je n’en serais pas là… au Four Seasons.

MERCI

Je remercie vraiment chaque personne que j’ai croisée sur mon chemin, car elles m’ont toutes apporté des conseils précieux. Je crois fermement que durant notre parcours de vie, des gens sont là prêts à nous aider. À nous de garder les yeux et les oreilles ouverts, attentif à ce qu’il se passe…

Photos : Four Seasons à Genève.

A lire également