Propos recueillis par Laure JEANDEMANGE.

Après un parcours diversifié en stratégie et conduite de projets en France et à l’international, Aldina Duarte Ramos, personnalité incontournable de l’univers du spa, a fondé aujourd’hui sa propre agence dédiée aux secteurs de l’hospitalité, luxe, voyage, bien-être et dévoile les pistes de réflexions à suivre en 2024…

Aldina Duarte Ramos

Aldina Duarte Ramos

QUELLES TENDANCES EN 2024 ?

Deux tendances de fond continuent de se démarquer pour le spa en 2024 : la haute technologie et la performance d’une part, la naturalité et la tradition d’autre part. Ce sont deux familles de besoins client qui vont rester pérennes et se compléter de manière continue, se nourrir l’une l’autre, tel un cercle vertueux. Il y a un en effet un public pour les deux :

– d’un côté, une clientèle en recherche de performances immédiates qui ne va cesser de croître. La technologie est donc indispensable. On parle également de Welltech,

– d’un autre côté, la demande en naturalité va continuer de révolutionner l’univers de la beauté et du bien-être car les consommateurs obligent les producteurs, les fabricants, à repenser leurs formules, à innover. Avec la naturalité, vient aussi le retour du produit brut et de la tradition, des rituels millénaires.

LES SOINS DE COURTE DURÉE : CAP SUR LE RÉSULTAT

Les créneaux de soins courts sont une grande tendance. Les anglophones qualifient cette catégorie de soins « pick me up treatments ». L’idée est claire : court et efficace. Le recours à des soins haute technologie peut contribuer à augmenter le résultat recherché.
Le conseil : lorsque vous recherchez une technologie, assurez-vous d’avoir un vrai résultat dès le premier soin. Coupler ces technologies avec des manœuvres manuelles offre des résultats formidables ! Faites une photo avant/après pour votre client.
On observe également une forte demande de soins courts dans des hôtels de villégiature ou de grands spa urbains. En effet, les clients privilégieraient plusieurs soins courts, au détriment de longs rituels. C’est une astuce pour obtenir un résultat ciblé, vivre une expérience bien-être, profiter des installations et dépenser moins. L’exploitant entre alors dans une dynamique de revenu additionnel formidable, constituée d’une série de soins complémentaires à la carte. Les fameux « add on ».

LA RECHERCHE DE NATURALITÉ ET LA CONSCIENCE DE SOI

Le client recherche la naturalité des formulations d’une part, mais aussi tout ce qui est non-invasif. Et il existe de nombreuses technologies non-invasives. Le principe de la beauté sans aiguille est très intéressant. Par ailleurs, cela remet « la main » au cœur du sujet et, par là-même, l’expertise métier.
Sans technologie, toutes les pratiques comme le yoga, le mouvement, la méditation, la respiration, la maîtrise du souffle, sont les nouveaux classiques du spa et de l’écosystème du bien-être, car plus c’est maîtrisé et plus le client agit en prévention, à l’écoute de son corps. En conscience.

LE BIEN-ÊTRE COMME VECTEUR DE PERFORMANCE

La gestion des émotions et la maîtrise du souffle sont le socle d’une performance durable. Le bien-être de demain sera synonyme de performance dans tous les domaines, parce que si les clients apprennent à s’écouter, arrivent à se régénérer, ils seront plus engagés. Par ailleurs, il n’est pas question que du client, une réponse au bien-être des collaborateurs doit faire partie intégrante de la stratégie de chaque établissement.

LES RETRAITES URBAINES

Le yoga, le mouvement, la maîtrise du souffle, la méditation sont les indispensables que l’on retrouvera dans les modèles de retraite urbaine. En effet, la retraite bien-être n’est pas réservée aux établissements qui sont dans la nature, dans des lieux magnifiques. Aujourd’hui, en ville, il est tout à fait possible de proposer une retraite avec un parcours adapté, revisité, bousculé.

Le contenu de la retraite urbaine

La retraite urbaine peut durer quelques heures, une journée entière, ou encore s’étirer sur plusieurs jours, avec ou sans hébergement. Elle peut être organisée avec des ateliers de partage, des conférences, des ateliers de yoga, de cardio-training, des techniques d’automassage, de méditation. Après l’atelier, il peut y avoir un petit-déjeuner, un snacking, un repas, où l’on partage avec le client des recettes à transposer chez lui. Finalement, c’est tout un parcours d’expérience client autour de son propre bien-être.

Le pouvoir de la communauté

La notion de communauté est sous-jacente des retraites urbaines. Le pouvoir de la communauté, du partage en communauté, est puissant. C’est ce qui fera grandir les clients et leur apportera des moments concrets de réussite et/ou d’apprentissage. C’est également porteur de légitimité pour l’établissement.

De spa manager à wellness manager

Il faudrait peut-être aussi penser à l’évolution du terme de « spa manager », qui devient aujourd’hui trop segmentant et qui pourrait devenir « wellness manager », dans une vision plus globale et holistique du métier.

QUE RECHERCHE VOTRE CLIENT ?

C’est une question essentielle à laquelle tout porteur de projet doit savoir répondre. Il n’y a pas une, mais plusieurs réponses, plusieurs segments de clientèle à cibler.
Votre établissement est-il une destination bien-être ? Votre spa fait-il partie du bouquet de services, au même titre que le restaurant, ou même le service en chambre ? Souhaitez-vous développer la clientèle locale ou bien concentrez-vous votre produit sur la clientèle hébergée ? Quel que soit votre cas de figure, il existe un modèle opérationnel à trouver. C’est ce qui me plaît le plus dans mon métier : penser les points de différenciation et d’innovation, identifier les leviers d’expérience et de performance autour du bien-être, mettre en œuvre des outils spécifiques sur le terrain et piloter les résultats.

MON CONSEIL

Au-delà des tendances, avant l’exploitation de votre spa, ne négligez pas deux notions essentielles : la fonctionnalité et l’optimisation.
La fonctionnalité en soi est évidente pour une bonne exploitation. Si vous n’avez pas les bonnes fonctionnalités, vous aurez des contraintes trop importantes qui pourraient freiner, voire limiter votre réussite.
L’optimisation entre en jeu lorsque vous pouvez ajouter de la flexibilité et de l’agilité à la fonctionnalité pour booster les leviers de rentabilité. Je vois trop d’établissements qui cochent la case de la fonctionnalité et malheureusement, sur place, on ne peut que faire le constat de tout ce qui aurait pu être mis en place pour optimiser la rentabilité.

Ma devise

Ne jamais cesser d’apprendre. En ne cessant jamais d’apprendre, on évolue tout le temps, on progresse toute sa vie. Je n’ai jamais cessé de me former ; j’ai suivi un enseignement en yin yoga, face yoga, nutrition, psychologie positive et science du bonheur avec l’Université de Yale. Tout cela a ouvert ma réflexion et mon champ d’action sur le domaine du spa et du bien-être, au cœur des neurosciences.

Optimiser la fonctionnalité

Voici l’exemple d’un spa qui n’a pas de cabine double alors que c’est vraiment une demande du marché.
Mon conseil : posez-vous toujours la question pour savoir si vous avez le marché correspondant à votre proposition ?
Et si vous avez le marché, cherchez toujours l’optimisation, c’est-à-dire que deux cabines puissent être rassemblées, transformées en cabine double, et rester modulables en cabines simples. Vous répondrez ainsi à deux types de clientèle : la clientèle individuelle et la clientèle duo. Attention, il ne s’agit pas de faire de compromis sur la décoration. Il faut une isolation phonique, des fonctionnalités au niveau de l’eau courante…

La fonctionnalité qui ne fonctionne pas…

La circulation est vraiment le mot-clé pour la gestion des flux opérationnels pour l’équipe, et la gestion des flux d’expérience pour le parcours client. Rater les flux de circulation équivaudrait à créer des séries de fonctionnalités qui ne fonctionneraient pas entre elles…
Vous l’aurez compris, il faut donc bien distinguer fonctionnalité et optimisation et être très vigilant sur ces deux notions.