La solution pour les spa praticiennes et les exploitants de spa ?

Par Florence KOWALSKI, Spaboosting, Yog’n Vibes.

Dans un précédent article, je dépeignais un tableau peu encourageant du recrutement dans l’univers du spa. Dans ce contexte, une solution alternative semble émerger : le développement de l’activité de spa thérapeute en free-lance.

Pour les praticiennes, cela peut signifier moins de contraintes répétées au quotidien et la possibilité de préserver leurs envies et leur passion pour le bien-être. Pour les propriétaires des spas et hôteliers, ce qui a longtemps été un moyen de compléter leurs équipes, en cas de forte demande, est aujourd’hui de plus en plus un moyen de palier, chaque fois que nécessaire, à des recrutements non pourvus. Examinons ensemble comment ce système peut fonctionner correctement et produire des effets vertueux.

FREE-LANCE ET SPA THÉRAPEUTES : LA PROMESSE D’UNE QUÊTE DE SENS ?

Où sont les spa praticiennes ?

Que vous soyez spa manager, consultant dans le domaine du spa ou hôtelier en charge de créer vos équipes saisonnières, vous l’avez forcément constaté : les recrutements en spa sont devenus compliqués. Avant limitées aux seuls secteurs de l’hébergement (notamment les équipes en charge du ménage) et de la restauration, ces difficultés frappent de plein fouet, depuis la reprise de l’activité hôtelière post Covid, le secteur du spa. Et nous nous posons tous la même question : où sont-elles passées ?

À la recherche d’une nouvelle vie professionnelle

Les premières enquêtes de cabinets RH menées dans ce domaine montrent qu’a priori, l’arrêt de l’activité bien-être pendant la pandémie a poussé certaines spa thérapeutes à s’adapter en s’essayant à d’autres métiers (vente dans divers domaines notamment), métiers qui se sont finalement révélés mieux adaptés à l’épanouissement d’une vie sociale et personnelle en parallèle : pas de travail samedi ET dimanche, moins de travail en coupure (ces postes où vous commencez tôt, finissez tard et où vous avez trois heures de pause dans la journée dont vous ne savez pas toujours quoi faire, insuffisantes en général pour rentrer chez soi et se poser…). Ces situations de fait, installées dans l’univers du spa depuis de longues années, ont été remises en question par la réalité de la situation (chômage partiel des professionnel (le) s du spa, voire pas de ressource) que nous avons subie pendant ces longs mois.

La pénibilité du métier

À ces éléments constatés dans d’autres secteurs également en pénurie de main-d’œuvre, s’en ajoute également un, plus spécifique au monde du spa : la pénibilité du métier. En effet, au sein de l’univers hôtelier, le métier de spa praticienne est à part. Une spa manager spécialisée dans les saisons été et surtout hiver explique : Lorsque nous répartissons les logements entre les salariés, nous apportons un soin particulier au logement de l’équipe spa car, à la différence de tous les autres salariés, ils ont besoin de beaucoup de calme et de repos pour récupérer. Impossible pour eux de venir travailler en saison pour s’amuser et faire la tournée des bars tous les soirs car, d’expérience, je sais que l’organisme ne tiendra pas, donc inutile que je les emmène avec moi sur une saison hiver…. Alors forcément, cette première mise en garde lors de l’entretien de recrutement, quelle que soit la façon dont elle est amenée, crée une première barrière.
Et pourtant, la réalité est bien là : être spa thérapeute, c’est se retrouver dans une cabine obscure 90 % du temps (c’est-à-dire tout le temps de soin), dans un endroit souvent sans fenêtre (nombre de spas ont été conçus ainsi) et enchaîner des mouvements physiques gourmands en énergie sur le plan musculaire. La maîtrise de sa propre anatomie et des postures de massage, visant à respecter l’alignement du squelette, aident à préserver l’organisme de blessures trop rapides. La réalité du métier est celle d’une personne qui ferait du sport tous les jours, de façon parfois intensive, mais sans la prise en charge d’un sportif professionnel (qui se repose et se fait masser régulièrement…). Si vous ajoutez à cela la nécessité de garder votre attention focalisée sur votre client pendant tout le soin sous peine que votre client ressente que vous n’y êtes pas, ainsi que les énergies qui vont se dégager dans l’espace de la cabine le temps du soin (énergies du client qu’on récupère forcément en massage même si on fait tout pour s’en préserver), on comprend à quel point le métier de spa thérapeute est exigeant aux niveaux corporel, mental et émotionnel.
Enfin, un constat s’impose depuis cet été : au-delà de la maladie elle-même, la pandémie a provoqué beaucoup de stress et d’inquiétude au sein de la population et nous constatons tous que les tensions dans le haut et le bas du dos n’ont jamais été aussi importantes. Cela suppose le recours à des techniques dîtes de deep tissue qui, même parfaitement effectuées, sont exigeantes musculairement pour l’organisme des thérapeutes.

Être spa thérapeute, c’est passer 90 % de son temps dans l’obscurité

L’image du métier au travers de ces éléments peut sembler défaitiste, voire déprimant, mais c’est à ce jour la réalité. Et même si les passionnés du bien-être et du massage sont encore nombreux à sortir de filières type CQP spa praticien, technicien opérateur de spa…, cette réalité du métier les rattrape parfois rapidement.
Dans ce contexte, la multiplication de thérapeutes en free-lance peut être une réelle opportunité d’avenir à la fois pour les thérapeutes, pour les exploitants de spa… mais aussi, au final, pour le client !

FREE-LANCE ET SPA THÉRAPEUTES : QUÊTE DE SENS ET PROMESSE D’UNE VIE NORMALE ?

Dans ce contexte, on voit émerger, depuis quelques années, et de façon plus accrue ces derniers mois, de plus en plus d’intervenants en spa en statut free-lance. Le principe : ces personnes interviennent pour réaliser des soins comme n’importe quelle spa praticienne salariée du spa mais sont payées au soin, sur présentation d’une facture. Ce sont donc des personnes qui ont un statut d’indépendant (souvent micro-entreprise mais ça peut être aussi en société), et c’est ce statut qui leur permet d’émettre des factures à l’attention du spa qui aura employé leurs services, pour se faire rémunérer.

Free-lance en spa en 2022

Le contrat

Le contrat de free-lance qui lie l’exploitant du spa et la thérapeute est libre : les conditions d’intervention (tarif à l’heure fixe ou pourcentage des soins réalisés, heure jusqu’à laquelle la venue du thérapeute peut être annulée sans facturation de soins, etc.) sont fixées par les deux parties. Pour la thérapeute, cela veut dire une plus grande souplesse dans son planning, puisqu’elle peut choisir son amplitude horaire au quotidien et ainsi choisir de travailler beaucoup certains jours pour se préserver un ou plusieurs jours de son choix en semaine. Sur ce point, le bénéfice par rapport au rythme salarié est évident. De plus, plusieurs praticiennes interrogées sur ce statut expliquent qu’en n’étant plus forcées de masser autant d’heures par semaine, elles retrouvent l’envie de soulager et d’offrir du bien-être, ce qui est souvent la première raison pour laquelle elles ont choisi ce métier.

Financièrement pour le spa

Une quête de sens en quelque sorte, si chère à de nombreux salariés ces dernières années. Financièrement, l’opération est avantageuse au coût horaire, puisque l’intervention en free-lance est généralement facturée plus chère qu’une heure salariée mais cette rémunération plus élevée intègre la flexibilité de l’intervenante en free-lance qui ne se déplacera peut-être que pour une ou deux heures de soin.

Financièrement pour la free-lance

Le choix d’être free-lance pour mieux gagner sa vie suppose donc, comme pour la spa praticienne, de faire beaucoup d’heures de soin, auxquelles peuvent s’ajouter des déplacements à bien maîtriser pour ne pas trop grignoter sa marge. Par contre, la free-lance garde le choix de ses horaires et de la façon dont elle les répartit, et de son rythme de travail. Et ce point est fondamental dans la vision que ces praticiennes ont de leur métier, certaines choisissant même d’associer cette activité à un mi-temps plus alimentaire dans un tout autre métier pour pouvoir vivre de ce nouveau rythme d’activité.
Vu sous cet angle, faut-il imaginer que, désormais, les intervenants en spa extérieurs décident et fixent leurs conditions et les propriétaires de spa subissent ? Pas tant que ça car intégrer des prestataires free-lance dans une équipe de salariés peut être une réelle opportunité.

LES FREE-LANCE SONT-ILS UNE SOLUTION D’AVENIR PÉRENNE ?

L’intervention de la free-lance avant…

Le recours à des ressources en free-lance pour proposer des prestations bien-être aux clients, alors que l’équipe est au complet mais qu’il reste une cabine de soin disponible, a longtemps été perçu par l’exploitant de spa comme une solution de dernière minute ne nécessitant ni anticipation ni organisation spécifique. Le process est simple : le client demande un soin, on lui propose un créneau en lui disant qu’on le rappelle pour lui confirmer, on appelle ensuite la free-lance pour lui demander si elle est disponible à l’heure convenue avec le client, puis on rappelle le client pour lui donner la réponse.
Résultat : beaucoup de temps passé pour la réceptionniste spa ou la spa manager qui propose cette solution au client, l’impression d’être une ressource bouche-trou pour la thérapeute qui n’a, dans ces conditions, pas l’impression de travailler pour une équipe (et qui proposera le même soin que celui qu’elle propose à la concurrence sans être capable d’adapter ne serait-ce que son discours au lieu où elle intervient) et surtout, pour le client, une expérience pas très fluide à la réservation et, potentiellement, lors du soin…. Même si certains exploitants de spa, sous l’impulsion de leur spa manager, souvent ex-praticienne, ont adopté leur politique de recours aux free-lances en anticipant des plages horaires pré-bloquées pour être remplies par la réception sans avoir à demander à l’intervenante si elle est disponible, en formant par avance des free-lances à ses protocoles de marques…, le recours au free-lance restait jusqu’alors une solution à laquelle on espérait ne pas avoir à recourir.

L’intervention de la free-lance aujourd’hui

Or, aujourd’hui, la pénurie de ressources spa rend quasi-obligatoire le recours à des ressources en free-lance, de façon plus ou moins régulière. Ainsi, en exploitation saisonnière, certaines équipes ne sont jamais au complet sur l’ensemble de la saison. Cela signifie que, si l’équipe a été bien calibrée, il y aurait chaque jour suffisamment de travail pour occuper une ressource free-lance à temps plein.

Aujourd’hui, le recours à des free-lance est devenu obligatoire

LES FREE-LANCE, UNE SOLUTION D’AVENIR ?

Entre ce constat et le fait que les candidatures reçues pour des postes de spa-praticiennes salariées manquent cruellement de compétences ou, pire, de motivation, le recours à des prestataires free-lance peut devenir un élément d’une stratégie spa à part entière. Pourquoi ? Tout d’abord parce que les free-lance sont la plupart du temps des praticiennes qualifiées et expérimentées (autrement elles n’auraient pas de clients…) et motivées pour gagner leur vie par leur métier (car aucune d’entre elles ne vit d’amour et d’eau fraîche, sauf erreur de ma part…). De plus il s’agit souvent de praticiennes qui continuent à faire ce métier par envie de faire du bien, soulager, procurer du bien-être, et cela peut tout changer en termes de ressenti du soin et, par conséquent, d’expérience client. Cela permet même de mettre à la carte des soins des expertises différentes : on voit ainsi de plus en plus de kinésithérapeutes, capables de proposer des soins spécifiques ciblés très complémentaires du massage bien-être, démarcher des spas pour proposer leurs services en free-lance (ce qu’ils ne pourraient pas faire en salariés car ces soins diffèrent du massage bien-être traditionnellement demandé par les clients).
De plus, si ces ressources sont intégrées dans le fonctionnement de l’équipe lors des formations marques ou de certains événements de la vie de l’équipe (ex : dîner d’intégration de début de saison…), cela contribue à créer un lien qui donnera l’impression aux intervenants extérieurs de faire partie d’une même aventure.
Ainsi, travailler avec des free-lance, cela peut être travailler avec de vrais partenaires extérieurs, dans le strict respect de leur statut juridique, s’économiser les longs affres du recrutement quand les postes sont compliqués à pourvoir et surtout mieux gérer ses charges de fonctionnement en garantissant que face à chaque dépense effectuée pour prendre une free-lance, il y a un chiffre d’affaires entrant en face (ce qui ne peut être le cas pour une salariée).
Et donc ainsi améliorer la rentabilité du spa, qui reste un objectif ultime pour tout propriétaire de spa !

Les free-lance sont généralement des praticiennes qualifiées et motivées

On dit souvent que chaque crise, si elle cause des torts, fait forcément naître des opportunités. La pandémie que nous avons vécue pendant de longs mois et dont (on croise les doigts !) nous sortons lentement, a fortement impacté notre milieu du spa, notamment en compliquant encore les recrutements de spa thérapeutes. Plus qu’une obligation à laquelle on ne peut pas couper, le recours aux intervenants extérieurs peut constituer une véritable opportunité pour l’ensemble des acteurs : des praticiens plus motivés, plus passionnés et plus responsabilisés, des exploitants de spa capables d’optimiser leurs charges et d’enrichir leur offre de soins et, au final, une expérience client encore enrichie. Reste simplement à organiser cette collaboration dans le respect des intérêts de chacun pour créer un partenariat gagnant-gagnant qui de ce fait, sera pérenne.

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